Monday, March 8, 2010

Colette – Tuesday 28 January 1873 – Tuesday 3 August 1954




Introduction

Since today is International Women’s Day, I thought it would be the perfect time to present a woman who wrote in a language other than English. The language is French and the woman is Colette. I have read translations of her first Claudine novel, Claudine à l'école, and of her novel Chéri. If my French skills were better, I would read all French works in the original language. So for today, L’entrave, a novel written in French. Read about Colette in English by clicking here.

Excerpt from L’entrave

"Le peu qu'une femme puisse apercevoir d'elle-meme, ce n'est pas la calme et ronde lumiere d'une lampe, allumee tous les soirs sur la meme table, qui le lui rnontre. Mais, a changer de table, de lampe, et de chambre, qu'ai-je acquis? Le soupcon, bientot la certitude, que tous les pays vont se ressembler, si je ne trouve le secret de les renouveler, en me renouvelant, moi. Le temps est passe ou je comptais sur ma solide raison! La solide raison d'une femme... Si nous parlions un peu des « fondations inebranlables » d'une maison japonaise, aux murs en papier ? Ni solide, ni raisonnable, mais bien emue et bien tremblante, pour une banale rencontre tout a 1'heure, sur la Promenade des Anglais.

C'est tout simple, pourtant, cela devait arriver, cela aurait du arriver deja... La, tout a 1'heure, a cote de moi, il a passe sans me voir, I'homme qui voulait me donner son nom, son amour, 1'appui de son ferme coeur. II avait d'un cote une jeune femme et de 1'autre un tres petit enfant tout rond, qui marchait a peine. II ne m'a pas vue, parce qu'il donnait toute son attention, sa touchante et solen-nelle attention un peu bete, a 1'enfant qui trebuchait. « Grand serin!» il a passe si pres, j'ai vu ses longs cils durs, et sa cravate sanglee comme pour la vie. Il etait si pareil a lui-meme que j'aurais, comme autrefois, etendu la main pour desserrer un peu cette cravate et enfoncer, dans la poche du veston, un coin de mouchoir trop visible. J'ai peur, a present, du geste que j'aurais pu faire. Il m'a si peu sentie, si peu devinee, que j'ai eu 1'impression d'etre supprimee du nombre des vivants, le fantome d'air qu'il allait traverser. C'est singulier, je n'ai pas songe a regarder sa femme ni son enfant. Us ont continue tous les trois leur promenade le long de la mer.

Ce n'est pas d'amour que je tremble, ni de chagrin. Quelle est, dans mon trouble, la part du regret ? Je ne sais. Le choc, 1'eclair, viennent de me dormer la sensation de ma fragilite, bien mieux que la reverie maniaque, ou quoti-diennement je m'abuse sur ma sagesse. Meditation, si vous voulez... D n'y a pas de meditation sage. Toute meditation habituelle contient un principe de delire. Elle confine a la crise, a 1'extase provoquee, douloureuse ou non...

Et me voila partie a generaliser, bien femininement. Tant mieux! Il y a comme cela des heures ou je me plais assez en femelle. C'est comme si je constatais que je peux encore servir a quelque chose, amoureusement parlant.

Aurais-je aime qu'il me vit?... Non, je n'y tiens pas. Je redis son nom, malaisement, son nom encombrant: Maxime Dufferein-Chautel... Je suis sure de ne pas 1'aimer. Mais, tout de meme, cet homme-la, il represente 1'amour dans ma vie, et 1'aventure, et meme la volupte... C'est sans doute cela qui me tient tremblante et vague-ment revoltee. Cette bouche-la, ces mains-la, ce grand corps chaud, tout cela, ensemble, a ete bien pres de me composer un amant, il y a trois ans... S'il avait ete seul, tout a 1'heure, et qu'il m'eut parle, l'aurais-je nomme Max, ou « mon cheri» ou « vous » tout court ? Il avait son air le plus marie, mais c'est un air qu'il a, si j'ose dire, de nais-sance. Sa femme et son enfant, il les affichait comme des denrees neuves qu'il eut achetees place Massena...

Tachons d'etre sincere. Je ne 1'ai pas fui, mais je me suis cachee dans une immobilite qui seule pouvait me derober a ses yeux - le lievre surpris se terre et n'ignore pas qu'il est couleur de sillon... Le moindre geste, sur ma robe sombre, de ma main gantee de blanc, eut attire son regard - j'ai craint jusqu'a la volte brusque qui pouvait lui porter tout a coup mon parfum, toujours le meme... Je ne voulais pas, non, je ne voulais pas. J'ai rougi comme une femme surprise en bigoudis. Et puis il avait, lui, un air si riche de tant de choses nouvelles: un enfant tout frais, une femme en fourrures et en plumes, une canne que je ne lui connaissais pas; tandis que moi... Il m'humiliat, son air d'avoir fait fortune...."



Yesterday’s writer – Agatha Christie
Tomorrow’s writer – Anne Fine



Source: Colette. L’entrave. Flammarion, January 1997. Excerpt: pages 9-11

Images:
Left: Front cover of my personal copy of L’entrave
Center: Colette from the website centre-colette.com

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